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J'avais 20 ans. Joli jeune homme aux yeux
verts très pétillants. On a eu un véritable coup de foudre dans un bar. On s'est revu
plein de fois avant d'oser.
Un après-midi, chez moi, on buvait du thé en se
regardant sans rien dire. Quand tout à coup il s'est lâché:
- Haa ! Je suis fou de toi, il a mugi, fou-fou-fou de toi, je te veux, haaa Sophie, Sophie
!
Il s'est précipité à mes pieds et a enlacé ma taille. Le contenu de ma tasse a giclé.
Puis la tasse aussi. Il a renversé la table avec son genou. Je suis tombée du canapé.
Il m'a assailli sur la moquette, j'avais l'impression qu'un régiment tout entier me
passait dessus. Mais non, pas de chevaux, pas de chars
Seul sur moi il maintenait mes
bras au sol avec ses mains.
Il m'embrassait en grommelant "Mon amour, mon amour." Au huitième
" mon amour ", il a à moitié arraché mon chemisier, déchiqueté ma
jupe. J'étais presque nue. Il semblait en transes, il était tout rouge. Les petits poils
de la moquette me piquaient le dos.
- Ha Sophie ! Sophie !!! Il criait.
Plus il criait, plus la moquette me donnait limpression dêtre couchée sur
une barbe de trois jours ! Je me demandais si je naurais pas préféré
mallonger sur le paillasson quand il sest arrêté tout net.
Je te prie de m'excuser un instant, il a dit.
Il s'est relevé et a soigneusement chassé la
poussière sur son pantalon. Puis il s'est déshabillé. Je l'observais sans bouger,
stupéfaite. Il a enlevé sa chemise et l'a méticuleusement pliée comme pour la
présenter à la devanture dun magasin, manches à lintérieur, puis il
sest attardé à fermer le bouton du col et l'a posée sur le canapé. Il a enlevé
son pantalon, éjecté une petite poussière avec le pouce et l'index ; l'a plié en
respectant scrupuleusement le pli de la jambe et la déposé sur la chemise. Ensuite
il a enroulé ses chaussettes l'une dans l'autre sur le pantalon et ôté son caleçon,
posé bien à plat sur les autres affaires.
J'étais médusée.
Nu devant moi, il a annoncé fièrement : "Ça y est ma chérie, je suis prêt,
on peut y aller !"
On y est jamais allés. Cétait fini. Je me suis levée très vite en prétextant je
ne sais quoi.
C'est con, c'était peut-être l'homme de ma vie. Et
sans doute le seul capable de mettre de lordre dans mes placards.
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